Le Cortège de la Vierge

La Vierge de Nazareth a découvert la Trinité et ses projets ; première confidente de la Nouvelle Alliance, elle peut, avec Joseph, guider notre Avent.

Photo : Joseph Aubert, Huile sur toile (1892), église Notre-Dame, Besançon,

Le rendez-vous de Noël éclaire nos vues, secoue le calendrier, comme une pierre philosophale, capable de transformer le plomb de l’hiver en étincelles d’or. Dans le terreau de la foi, l’Église cultive ce germe d’amour pendant quatre semaines à peine ; un peu de temps pour approcher l’éternité.

Depuis la chute des premiers parents, une longue série de générations gisait dans la mort spirituelle ; les inspirations divines ont ouvert des fenêtres d’espérance. Les justes ont beaucoup imploré la plénitude des temps.

À un niveau excellent de foi, « notre Mère a longuement médité les paroles des saints, ces hommes et ces femmes de l’Ancien Testament qui attendaient le Seigneur, ainsi que les événements auxquels ils ont été mêlés. Elle s’est émue devant cette succession de prodiges, devant le débordement de la miséricorde de Dieu » (saint Josémaria, Amis de Dieu §241).

La Fille excellente de Sion brûlait de la soif du Juste. Pour Marie l’attente du Messie a connu un tournant avec l’annonciation de Gabriel. La Vierge de Nazareth a découvert la Trinité et ses projets ; première confidente de la Nouvelle Alliance, elle peut, avec Joseph, guider notre Avent.

Au milieu de l’Avent, la mémoire de Notre Dame de Lorette nous transporte à la « Sainte Maison » de Nazareth, écrin du salut annoncé. Joseph, descendant de David, y a accueilli son épouse virginale avant Noël (Matthieu 1, 24). Le couple saint de Nazareth guide l’Avent d’un pas sûr.

Parmi les aïeux du Messie, saint Joseph en est, à titre d’adoption, le dernier maillon ; charnière des derniers temps, il devient le Patriarche de la nouvelle alliance (Jean-Paul II, Le Gardien du Rédempteur §28). L’huile de Raphaël Sanzio (1504, Milan) montre un Joseph jeune qui remet l’alliance conjugale dans la main de Marie, en présence du grand prêtre. Selon la tradition, l’époux porte la tige fleurie, comme autrefois Aaron, tandis qu’un autre, déçu, casse son bâton de prétendant.

Marie, souveraine des Patriarches, a régné sur le cœur de son conjoint. L’amour réciproque baignait dans la charité : chacun se mettait au service de l’autre sans réserve. Leur alliance est gage du Nouveau Testament, car le foyer minuscule de Nazareth prépare la famille de l’Église universelle. Le lien mutuel de fidélité, qui a été le socle de la Sainte Famille, reste le paradigme du Peuple des rachetés.

Jésus est, selon la chair, « fils d’Abraham » (Matthieu 1, 1) et d’Adam (Luc 3, 38). La première phase du salut a été tressée avec la succession des patriarches, qui ont « engendré des fils et des filles » (Genèse 5, 4-30 ; 11, 11-25). À leur égard, Dieu a établi des alliances, renouvelé les bénédictions, permis des luttes. « Il est bien connu que notre Seigneur est issu de la tribu de Juda » (Hébreux 7, 14).

Fille privilégiée, la Mère de Dieu l’est aussi du peuple. Sa prière décrypte le passé providentiel : Dieu est venu en aide d’Israël « comme il l’avait promis à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa descendance pour toujours » (Luc 1, 54-55). Ces justes ont attendu longtemps le signe de la Vierge féconde ; désormais ils l’honorent au ciel. Si elle s’est enrichie de leur fidélité, Marie les a dépassés par l’amour. « Doux espoir des patriarches » (saint Éphrem, Hymne pour la Nativité), elle trône au-dessus de ses prédécesseurs. Les litanies de Lorette la reconnaissent comme Reine des Patriarches, d’Adam à Joseph.

Nouvelle Ève, elle a compati la mort du nouvel Abel rédempteur. Plus croyante qu’Abraham (Catéchisme §144) ; plus féconde qu’Isaac, qui « moissonnait au centuple » (Genèse 26, 12) ; présentant son Fils « comme l’odeur d’un champ que le Seigneur a béni » (Genèse 27, 27) ; fascinante comme l’échelle de Jacob, lien heureux entre ciel et terre (Genèse 28, 12). Elle engendre le « lion » de Juda, qui porte le « sceptre » victorieux, après avoir « foulé sa tunique dans le sang des grappes » (Genèse 49, 11).

Excellente devant ses ancêtres, Marie est la gloire de son peuple. Joseph, l’époux virginal, la vénère à Nazareth comme Reine des patriarches ; une mère toujours en veille sur les responsables de l’Église, des nations et des familles. Nous lui confions la santé du pape et la sagesse de ses collaborateurs.

Abbé Fernandez